Les ordonnances du 25 mars 2020, prises en application de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020, ont « gelé » les activités juridiques et le développement des procédures (consulter notre article Coronavirus et respect des délais légaux et contractuels : tout peut attendre !). Pendant deux mois, le temps du droit est suspendu, à de très rares exceptions près, liées à des cas d’urgence exceptionnelle.
A supposer qu’il n’y ait pas de prolongation, la vie juridique reprendra son cours, presque normal, le 25 mai 2020, au matin. En effet, la loi accordera un délai de deux mois au maximum ou un mois en matière de contrats et procédure civile. Ce délai constitue une période de rattrapage pour ce qui n’a pu être effectué pendant la période d’urgence sanitaire édictée par la loi.
Après, ce sera théoriquement, « comme avant ». On peut en douter.
1 – La période de transition
Combien de temps va durer cette période de transition ?
Les ordonnances (n° 2020-304 et n° 2020-306) du 25 mars 2020 ont choisi deux laps de temps différents : deux mois et un mois.
Ce sera deux mois pour :
- les actes à effectuer pour satisfaire à des conditions permettant d’obtenir le bénéfice d’un droit ou la cessation d’une obligation
- les mesures juridictionnelles et administratives extrêmement variées, allant de la conciliation au soutien familial.
Ce sera un mois pour :
- les obligations et sanctions contractuelles
- les délais de procédure devant les tribunaux de l’ordre judiciaire.
On peut comprendre ce double traitement dans la mesure où les intérêts particuliers mis en jeu dans le cadre des contrats et des conflits civils sont certainement plus fragiles que les intérêts plus généraux auxquels répondent les autres mesures. On peut aussi le regretter, car il risque d’entretenir une certaine confusion chez nombre d’acteurs de la vie économique et sociale : ce point de droit est-il soumis au délai de deux mois ou d’un mois ?
La réponse sera facile pour les procédures civiles, sans doute plus délicate pour le reste.
Comment se passe cette période de transition concrètement ?
Il s’agit d’une prorogation, c’est à dire l’octroi d’une période supplémentaire pour faire valablement des actes qui auraient dû être faits entre le 12 mars et la fin de la période d’urgence, actuellement fixée au 24 mai 2020.
Cela en simplifie la mise en oeuvre, dans la mesure où il n’y aura pas à effectuer de calculs aussi compliqués que dans le cas d’une suspension des délais. En effet, dans un tel cas, il aurait fallu arrêter le décompte des jours (ou des mois) au 12 mars. Il aurait fallu ensuite faire repartir ce décompte à partir du 25 mai, avec tous les risques d’erreur que cela eût comporté.
Quels sont les actes à faire ?
A peu près tous les actes de la vie juridique, tels que rappelés dans les deux ordonnances n°2020-304 et n°2020-306 du 25 mars 2020, tant auprès des services de l’Etat, qu’en procédure civile et à l’égard des personnes liées par contrat.
En pratique, cela veut dire que les professionnels du droit, qu’il s’agisse des huissiers de justice, des notaires, des avocats généralistes ou spécialistes en droit du patrimoine familial, vont se trouver surchargés. En effet, il faudra rattraper le retard de plus de deux mois et, en même temps, effectuer tous les actes qui doivent être faits en période normale.
Le délai d’un mois en procédure civile et dans le domaine contractuel va se révéler terriblement court. D’autant qu’il est à redouter que de nombreux justiciables ne prennent conscience de leurs droits et devoirs qu’au dernier moment.
Beaucoup d’études notariales et de cabinet d’avocats ont d’ailleurs pris les dispositions nécessaires pour anticiper en continuant à fonctionner pendant cette période d’urgence sanitaire. Les entretiens téléphoniques, les échanges électroniques, les transmissions de documents via internet, permettent, autant que les clients le souhaitent, de préparer, sans tension ni pression du temps, des dossiers auxquels il ne manquera plus que la date pour effectuer les actes nécessaires.
2 – Le retour à la normale
Les dates de reprise de l’activité juridique
Juridiquement, c’est en réalité un triple retour à la normale.
Actes faits avant l’état d’urgence sanitaire : le cours normal reprend dès le 25 mai 2020 et les divers délais s’appliquent aussitôt.
Droits et obligations ayant fait l’objet d’actes :
- entre le 12 mars et le 24 mai 2020 : le retour à la normale se fera après le 24 juin s’il s’agit de procédure civile ou d’exécution de contrats.
- entre le 12 mars et le 24 mai 2020 : le retour à la normale se fera le 25 juillet pour les autres mesures.
Vers un allongement des délais
En pratique, bien des délais vont s’allonger, en toute légalité. Dans le domaine contractuel, certaines des parties vont modifier leurs clauses d’un commun accord. en effet, par souci de pragmatisme, les contractants adapteront les obligations aux conséquences économiques et financières, particulièrement lourdes, de la crise sanitaire.
L’État a donné l’exemple en accordant divers reports de paiements et des diminutions de charges aux entreprises.
Les banques ont, pour plusieurs d’entre elles, accepté de suspendre pendant un délai de 6 à 12 mois, les échéances de prêts.
Il est probable que tous les acteurs de la vie économique et sociale préféreront, chaque fois que ce sera possible, donner un peu plus de temps pour payer une facture, livrer une marchandise, mettre en oeuvre un service, voire diminuer le montant d’une pénalité, plutôt que de se montrer intransigeant et de provoquer une rupture, une perte d’un bien ou toutes chances de paiement.
Dès les derniers jours précédant la loi du 20 mars 2020, les avocats ont pu constater que les magistrats chargés de la mise en état dans les tribunaux (grands et moyens) et les cours d’appel, renvoyaient les affaires à des dates très éloignées, souvent situées dans le dernier trimestre 2020. Il est donc à peu près assuré que toutes les affaires déjà retardées par l’état d’urgence sanitaire le seront encore du fait de l’encombrement des juridictions.
Vers des résolutions à l’amiable
Il n’est donc pas exclu que les méthodes de résolution amiable des conflits (conciliation, médiation, négociations entre avocats sur instructions de leurs clients) connaissent un essor, en ce qu’elles permettraient d’aboutir à un résultat de manière beaucoup plus rapide. Les magistrats avaient déjà tendance à inciter (parfois fortement) les parties au procès à recourir à ces méthodes : nul doute que la situation à venir ne les y incitent encore plus.
Les avocats spécialistes en droit des successions possèdent une longue et solide expérience de la gestion de ces processus qui nécessitent des discussions, des entretiens et des échanges de correspondance solidement fondés en droit, tant avec les notaires qu’avec les avocats adverses.