Au décès de chaque personne, s’ouvre automatiquement sa succession et se pose, aussitôt, la question de savoir qui va en bénéficier.
Le code civil donne la priorité aux « héritiers », c’est à dire aux membres plus ou moins proches dans la famille du défunt : enfants, conjoint, parents, frères et sœurs, neveux et nièces etc.
Ce seront, statistiquement, le plus souvent, les seuls à se partager la succession. Voir notre article : Qui sont les héritiers désignés par la loi ?
Il arrive cependant qu’une personne ait, de son vivant, organisé personnellement, la transmission de tout ou partie de son patrimoine, en rédigeant ou en dictant un testament.
Par cet acte, il va désigner ceux auxquels il entend que soient attribués des immeubles, des meubles ou des sommes d’argent : les bénéficiaires de telles libéralités portent alors le nom de « légataire ».
Pour le testateur, la marge de manœuvre est plus ou moins étendue, selon qu’il laisse ou non des enfants et le nombre de ces enfants. En effet, la loi française prévoit qu’une partie de la succession est réservée aux enfants :
- 1/2 pour un enfant,
- 2/3 pour deux enfants
- 3/4 pour trois enfants et plus.
Le surplus (de 1/4 à la totalité en l’absence d’enfants) constitue la « quotité disponible », c’est à dire la fraction sur laquelle peut porter le testament.
La liberté de choix, au moment de la rédaction du testament, est quasi-totale. En effet, peuvent être désignés comme légataire des parents proches ou éloignés, des amis, des voisins, mais aussi des associations (caritatives ou non), des sociétés ou même des institutions, telles que la commune ou le département. Ne viennent limiter cette liberté que des motifs tenant à l’ordre public (pas question d’attribuer un legs en chargeant son bénéficiaire de commettre un crime ou un délit) ou aux mœurs (par exemple : « le legs sera attribué au légataire dès qu’il aura fait la preuve de sa polygamie ! »).
Il revient également à celui qui rédige son testament de choisir la formule juridique du legs, sachant qu’il en existe trois :
- le legs universel
- le legs à titre universel
- le legs particulier
Les définitions et surtout les conséquences patrimoniales et fiscales de chacune de ces sortes sont bien différentes et nécessitent de bien les distinguer.
Qu’est-ce qu’un legs universel ?
« Le legs universel est la disposition testamentaire par laquelle le testateur donne à une ou plusieurs personnes l’universalité des biens qu’il laissera à son décès. »
La caractéristique de ce type de libéralité est l’attribution de la totalité du patrimoine successoral, peu important (en théorie) que cette universalité soit attribuée à une ou plusieurs personnes.
En pratique, tous les avocats spécialistes en droit des successions et les notaires déconseillent fortement cette faculté d’attribution à plusieurs. Car en effet, sauf composition particulière de l’actif successoral, celle-ci va générer des conflits de gestion et de répartition. Les autres types de legs permettent d’aboutir à des résultats semblables, avec de moindres risques de disputes.
En revanche, ce type de legs est parfaitement adapté à la dévolution à une seule personne. Il a le mérite de la simplicité et de la clarté. Il s’adapte à tous les types de patrimoine, quelles que soient la nature et la valeur des biens à transmettre, que la succession soit modeste ou conséquente.
La situation du légataire universel suscite plus ou moins d’envies, selon les circonstances. Face à un ou plusieurs héritiers dits « réservataires », il doit lui (ou leur) demander la délivrance de son legs. Il n’est pas sûr d’obtenir leur consentement, car il apparaît comme un redoutable concurrent qui va les priver du choix des modalités de partage et il devra peut-être se résoudre à saisir le tribunal judiciaire pour faire valoir ses droits.
En effet, comme le rappellent constamment les tribunaux, le légataire universel a vocation à recevoir la totalité du patrimoine successoral, à charge pour lui de rétrocéder aux héritiers réservataires la part qui leur revient, sachant que cette transmission peut se faire en argent et non pas en nature !
Si vous souhaitez en lire davantage sur le légataire universel, vous pouvez consulter notre article Légataire universel : bonheurs et malheurs.
Qu’est-ce qu’un legs à titre universel ?
« Le legs à titre universel est celui par lequel le testateur lègue une quote-part des biens dont la loi lui permet de disposer, telle qu’une moitié, un tiers, ou tous ses immeubles, ou tout son mobilier, ou une quotité fixe de tous ses immeubles ou de tout son mobilier. »
Ce type de legs n’a d’intérêt que si deux conditions sont réunies :
- un patrimoine d’une importance réelle
- le souhait d’en faire profiter plusieurs personnes, héritiers ou non.
Si tel n’est pas le cas, mieux vaut se tourner vers une des deux autres formules.
Naturellement, le risque de conflit, entre légataires ou entre légataires et héritiers, de toutes façons existant, sera d’autant plus élevé que les modalités seront imprécises ou complexes.
Comme le légataire universel, le légataire à titre universel est tenu de solliciter la délivrance de son legs auprès des héritiers réservataires, s’il y en a.
Qu’est-ce qu’un legs particulier ?
Le legs particulier est la transmission d’une « chose » ou de plusieurs.
Il peut s’agir :
- d’immeubles (maison, appartement ou terrain),
- de meubles déterminés (voiture, bijoux, titres de société),
- de meubles indéterminés (somme d’argent, volume de bois, quantité de céréales).
Le testateur peut moduler en léguant la pleine propriété, ou seulement la nue-propriété ou l’usufruit, voire un droit d’occupation viager. Il peut même prévoir que le bien sera transmis libre de tout droit, les taxes étant alors portées au passif de la succession.
Si le bien légué n’existe plus à l’ouverture de la succession, par suite d’une destruction ou d’une vente ou d’une cession amiable avant le décès, le légataire ne peut plus rien exiger.
Ce type de legs constitue une faculté très intéressante pour ceux qui veulent témoigner, de manière posthume, de leur reconnaissance, de leur amitié ou de leur confiance pour poursuivre une activité qui leur tenait à cœur : léguer un immeuble qui sert abriter une association caritative, ou plus prosaïquement choisir l’ami dont on sait qu’il continuera une collection !
Fiscalement, le légataire, quel qu’il soit, est taxé en fonction de son lien (ou non) de parenté avec le défunt, et les droits peuvent atteindre 60 % du total de la succession qu’il recueille. Peuvent bénéficier d’exonérations ou de diminutions, divers types d’associations, en général à vocation sociale, telles que définies par le code général des impôts.
On voit tout ce que permet la technique des legs, mais aussi les sérieux risques de difficultés qu’elle peut engendrer lorsqu’elle est mal utilisée. Avant de se lancer dans une répartition de ses biens post-mortem, il est nécessaire de bien définir, de préférence avec un avocat spécialiste ou un notaire, les personnes que l’on souhaite avantager, les biens qui pourraient leur être attribués et la forme juridique qui apparaîtra la mieux appropriée.