A la tristesse de perdre un parent ou un ami proche, aux multiples et pénibles démarches à effectuer après des autorités administratives et des organismes divers, surtout ne pas ajouter, quelques jours plus tard, une déconvenue financière !
La qualité d’héritier ou de légataire universel ouvre droit à la transmission de tout ou partie du patrimoine du défunt, selon les règles du code civil ou selon les dispositions testamentaires.
Perspective qui peut paraître consolatrice ou simplement séduisante : voici le moment de retrouver les souvenirs du disparu, de prolonger les liens qui s’étaient noués, voire de poursuivre des projets dans lesquels il s’était lancé et que la mort a suspendus.
Encore faut-il que le patrimoine successoral dévolu aux héritiers ou aux légataires ne soit pas pure chimère, ce qui est le cas lorsque les dettes contractées par le défunt l’emportent largement sur les quelques biens qu’il laisse : le plus souvent des meubles, plus rarement un immeuble.
En effet, accepter purement et simplement une succession implique que l’héritier ou le légataire universel ou à titre universel non seulement reçoive les actifs, mais aussi prenne en charge les dettes de celui auquel il succède. Et, si le total des dettes dépasse le total de l’actif, l’héritier sera tenu de les payer sur ses biens personnels !
Les dettes peuvent être de natures variées (débits bancaires, factures de fournisseur impayées, taxes et impôts négligés, aides sociales avancées, etc.), mais surtout d’un montant incertain et tel, qu’il peut parfois dépasser le chiffre de l’actif.
En effet, tout le monde ne gère pas son patrimoine à l’image du « Père Goriot » de Honoré de Balzac qui, à son décès laissait une richesse considérable (et insoupçonnée), exempte de tout déficit ou débit.
Afin d’éviter une mauvaise surprise, il est donc impératif pour un héritier ou un légataire de savoir s’il existe des dettes et quel est leur montant, dans une moindre mesure, quelle est leur nature.
Comment vérifier qu’une succession ne comprend pas de dettes ?
Solution 1 : confier à un notaire le soin de régler la succession
L’intervention d’un notaire est obligatoire dès lors qu’un immeuble fait partie de la succession ou lorsque le montant de l’actif successoral dépasse 5 000 €.
Le notaire se voit confier la mission et les pouvoirs de collecter toutes les informations patrimoniales relatives à la personne décédée : soldes de comptes bancaires, loyers à percevoir, charges de copropriété impayées, dettes fiscales, avances au titre de l’aide sociale, etc.
Il est, au bout de quelques semaines, en mesure de dresser une sorte d’inventaire du patrimoine, nommé « état liquidatif », comprenant les éléments d’actif, mais aussi le passif constitué par les dettes du défunt. Bien entendu, ces éléments sont aussitôt communiqués aux héritiers qui peuvent en tirer toutes conséquences.
Dans certaines successions, heureusement minoritaires, la tâche du notaire s’avère ardue, le plus souvent parce qu’il ne reçoit pas les réponses attendues. C’est le cas de nombre d’établissements bancaires qui bénéficient d’une caution accordée par le défunt pour garantir la bonne fin d’une opération d’achat immobilier par une société civile ou un proche, mais aussi d’établissements de crédit qui avaient financé une opération de « location avec option d’achat ».
Les avocats spécialistes en matière de succession et les notaires constatent qu’en dépit de la (relative) simplicité des calculs pour savoir si la caution est ou non débitrice, les services de bien des banques ne manifestent guère de célérité.
Force est alors de se tourner vers une procédure formellement plus complexe mais aussi plus sûre.
Solution 1 : engager la procédure « l’acceptation à concurrence de l’actif net »
Lorsque, malgré les efforts du notaire, les créanciers éventuels ne répondent pas, que le mystère demeure, il faut alors se tourner vers une procédure particulière, « l’acceptation à concurrence de l’actif net ». Prévue par les art. 787-803 du code civil, elle se développe en plusieurs temps.
L’héritier va déclarer au notaire, par écrit, qu’il choisit cette mesure et qu’il lui confie le soin de mettre en œuvre les diligences prévues par la loi.
Le notaire commence par dresser un inventaire des éléments d’actif et de passif, avec indication de la valeur de chaque article, éventuellement avec l’aide d’un « commissaire priseur », maintenant dénommé « commissaire de justice ».
Puis, il va transmettre l’inventaire au greffe du tribunal et publier la déclaration de l’héritier, accompagnée des renseignements utiles pour que les créanciers du défunt puissent avoir connaissance de l’ouverture de la succession et soient en mesure de justifier auprès du notaire de l’existence et du montant de leur créance.
S’écoule alors un délai, incompressible, de 15 mois au terme duquel le notaire sera en mesure de connaître parfaitement les dettes qui pèsent sur la succession.
Il va dresser un tableau définitif du passif successoral qui comprend les dettes déjà connues à l’ouverture de la procédure d’acceptation à concurrence de l’actif net, auxquels viendront s’ajouter les dettes qui lui auront été déclarées par les créanciers pendant la période de 15 mois. Ce tableau est définitif parce que les créances qui n’ont pas été déclarées dans ce délai de 15 mois sont désormais éteintes.
Si le montant des dettes dépasse le montant de l’actif, l’héritier ne percevra rien, mais ne sera pas obligé de payer les dettes du défunt sur ses biens personnels. Les créanciers seront payés autant que l’actif le permettra, et pour certains d’entre eux, en dessous du chiffre de leur créance.
Cette mesure est extrêmement bénéfique pour l’héritier ou le légataire universel puisque l’existence et le montant des dettes sont définitivement fixés.
Elle présente cependant l’inconvénient d’augmenter la durée du règlement de la succession de 15 mois et souvent plus en pratique, car il faut le temps de préparer la déclaration, l’inventaire et les modalités de la publicité. Elle implique également des coûts supplémentaires, supportés par la succession : frais d’inventaire, de publicité et des prestations du notaire, dont le montant est, en partie, lié à l’importance de la succession.
Il convient donc, avant de choisir ce mode d’estimation des dettes d’une succession, de prendre le conseil d’un notaire ou d’un avocat spécialiste en matière successorale pour s’assurer que cette procédure est nécessaire.