Le testament par « acte authentique », c’est-à-dire écrit par un notaire, a la réputation d’être beaucoup moins fragile qu’un testament « olographe », c’est-à-dire écrit de la main du testateur.
C’est parfaitement justifié car les conditions dans lesquelles cet acte est établi profitent très largement à sa sécurité : il ne peut être passé que devant un notaire, voire deux.
La qualité de notaire va permettre de garantir, outre l’exactitude du texte, l’identité de l’auteur du testament et la date de rédaction par le biais de son enregistrement officiel.
Un tel testament devient-il pour autant absolument incontestable ?
Évidemment, non. Les avocats spécialistes en droit du patrimoine familial reçoivent régulièrement des héritiers mécontents leur confiant la mission de faire prononcer la nullité de tout ou partie d’un testament par acte notarié.
A cette fin, deux pistes : soit les formes précises prévues par la loi n’ont pas été respectées, soit l’auteur du testament n’était pas véritablement apte à dicter ses volontés.
La violation des règles de forme
La loi décrit précisément les formalités à respecter pour les testaments authentiques et les notaires en ont une pratique usuelle.
Le testament est rédigé, sous la dictée de son auteur, par le notaire, en présence soit de deux témoins, soit d’un autre notaire, qui en donne ensuite lecture au testateur. Tous les participants, testateur, témoins et notaire(s), signent ensuite cet acte. Le notaire se charge ensuite de faire mentionner ce testament dans un fichier national, auquel tout notaire en charge de régler la succession pourra avoir accès.
La loi prévoit également les obligations du notaire lorsque le testateur souffre d’un ou plusieurs handicaps : surdité, mutisme, incapacité à lire, écrire ou signer. Il doit alors porter dans l’acte les constatations de cette ou ces incapacités et préciser comment il agit en conséquence.
Compte tenu de ces exigences, l’avocat spécialiste va d’abord recueillir tous les éléments de fait concernant le testateur : pouvait-il s’exprimer, était-il capable de lire, d’entendre ? L’avocat spécialiste va ensuite procéder à un examen minutieux de l’acte notarié pour s’assurer que toutes les préconisations légales ont été respectées. Par exemple, manque-t-il une signature, l’identité des témoins est-elle complète, la mention de la fracture de la main droite du testateur est-elle portée ?
Il faut également confronter l’acte et ses mentions à la réalité de la situation : une signature totalement différente du paraphe usuel du testateur éveille aussitôt le doute, tout comme une discordance entre la présence d’un témoin à un acte et sa dénégation postérieure, laissant à penser qu’un autre s’est substitué à lui !
Pour parvenir à faire déclarer nul un tel testament par la justice, il faut utiliser la procédure spécifique de « l’inscription de faux » qui a exclusivement pour but de faire établir la fausseté d’une ou plusieurs mentions d’un acte authentique. Il peut s’agir d’une procédure menée en parallèle d’une procédure de partage judiciaire. Par exemple, si un héritier assigne les autres en justice en se prévalant d’un testament par acte notarié, un autre pourra contester la validité de cet acte en répliquant par une « inscription de faux ». Les juges devront d’abord trancher sur cette question de la fausseté ou non du testament, avant de décider sur la demande de partage judiciaire.
Si les dernières volontés se révèlent surprenantes, voire choquantes, cela ne suffit pas, à soi seul, à contester la validité d’un testament. En revanche, replacé dans un contexte, il peut être le signe révélateur d’un état de santé du testateur qui le rendait incapable – au sens juridique du terme – de dicter valablement ses ultimes dispositions.
La défaillance de volonté du testateur
Une fois constatée la parfaite régularité formelle d’un acte notarié, l’avocat spécialiste sollicité par un héritier ou un légataire à fin de contestation d’un testament va s’orienter vers l’examen de circonstances extérieures susceptibles d’avoir affecté sa validité.
Première question : celui ou celle qui a dicté son testament était-il en possession de tous ses moyens ? La réponse peut être aisée à apporter, dans les deux sens. Le testateur, dans la force de l’âge, n’a jamais souffert d’une quelconque maladie ou infirmité, physique ou psychique et ses dernières volontés, même si elles sont décevantes pour certains, sont frappées au coin du bon sens. Ou, inversement, le testateur, atteint d’une grave maladie mentale, a réussi à cacher qu’il se trouvait sous tutelle, ce qui ne lui permettait pas de rédiger ou de dicter ses dernières volontés. Voir notre article sur le testament en cas de tutelle et curatelle.
Le plus souvent, il faut entreprendre de véritables recherches pour vérifier la capacité intellectuelle au moment où l’acte est rédigé. Pour cela il est possible de solliciter la communication du dossier médical, des témoignages de proches, des dépenses par le biais du compte bancaire, bref, toutes les pièces qui peuvent faire apparaître un comportement extravagant et des troubles de la conscience.
Ainsi, d’un testament dicté par un patient entre la visite de son médecin constatant sa perte de repères et son hospitalisation dans la même journée ou d’un retraité, en résidence pour personnes âgées qui avait, quelques jours avant de dicter son testament, acheté 18 montres de qualité courante au même site de vente en ligne !
La seconde question vise les conditions dans lesquelles le testament a été dicté : le testateur était-il bien libre de ses décisions ? La loi précise, en effet, que le testament (olographe comme par acte authentique) est nul si le consentement a été vicié par l’erreur, le dol ou la violence.
En ce qui concerne l’erreur, elle peut porter sur l’existence d’un bien légué, sur la qualité d’un héritier, ou sur les droits dont le testateur peut disposer : on ne lègue pas un usufruit, pas plus qu’on ne transmet la totalité de son patrimoine à un voisin quand on a des enfants encore vivants !
Le dol se rapproche de l’erreur, en ce que ce sont des manœuvres frauduleuses destinées à induire en erreur le testateur : exemple classique de celui qui se fait consentir un legs important après avoir persuadé qu’il est le dirigeant d’une ouvre caritative… purement imaginaire !
Enfin, la violence s’exerce le plus souvent de manière sourde, entre autres, sous forme de chantage formulé plus ou moins brutalement : « si je ne suis pas désigné sur votre testament notarié, je ne m’occupe plus de vous ! ». Elle recoupe souvent le fameux abus de faiblesse que les avocats spécialistes connaissent bien.
Comme on peut le constater, les possibilités de contestation sont très variées, mais aussi très techniques et nécessitent une analyse approfondie de toutes les caractéristiques de la situation, que seul un avocat spécialiste en droit des successions est à même de réaliser.