Cour de Cassation – première chambre – 24 octobre 2012 – n° 11-20.442
La Cour de cassation vient de rappeler, en cassant un arrêt de la Cour d’appel de Douai que si ces trois notions, (qui relèvent de droits et de techniques différents, en l’espèce le droit pénal et le droit civil), ne sont pas nécessairement identiques, il est des situations dans lesquelles elles se superposent parfaitement.
Madame W…, nièce et héritière de Madame C … avait assigné et constitué avocat pour demander au tribunal de grande instance en chambre civile, puis à la Cour d’Appel de Douai d’annuler le testament rédigé par sa tante le 24 septembre 2003, par lequel elle léguait ses biens aux époux Z…, la dite tante étant décédée le 18 octobre 2004.
Son avocat rappelait que les époux Z venaient d’être définitivement condamnés par le tribunal correctionnel à des peines d’emprisonnement pour avoir, entre janvier 2003 et octobre 2004, abusé de la particulière vulnérabilité de Mme C .., très affaiblie par l’âge et la maladie, tant en se faisant acheter divers biens mobiliers et immobiliers qu’en la manoeuvrant pour qu’elle rédige un testament en leur faveur, réalisant ainsi un véritable détournement de l’héritage.
La cour d’appel avait pourtant refusé d’en tirer les conséquences et avait débouté la nièce.
Pour cela, les juges avaient estimé que si la preuve de la « particulière vulnérabilité » de Madame C .. était incontestablement rapportée, il n’en était pas de même de l’insanité d’esprit au moment de la rédaction du testament, il n’était pas démontré, selon eux, que «l’intelligence de la testatrice ait été obnubilée (sic) ou sa faculté de discernement déréglée » ; ils en tiraient la conclusion que la condition posée par l’art. 901 du code civil, selon laquelle : « pour faire une libéralité, il faut être sain d’esprit » était réalisée, et que le testament était valide !
Dans son arrêt du 24 octobre 2012, la1ère chambre de la Cour de Cassation censure cette motivation, en notant que l’on ne peut pas écrire une chose et son contraire : la Cour d’Appel avait relevé que Madame C… « ne pouvait manifester sa volonté », c’est donc qu’elle n’était pas « saine d’esprit », sans avoir à chercher au delà sur sa prétendue intelligence ou la faculté de discernement.
Sage décision en matière de successions testamentaires, pleine de bon sens : elle évite des analyses trop subtiles – et quasiment impossibles – de l’esprit de la personne décédée, tout en exigeant comme critère d’un trouble mental, un fait objectif, grave, mais simple à constater et à prouver.